Profession : vigneronne heureuse
Vigneronne à Montgenost, Hélène Cocteaux forme avec son époux Benoît un duo dynamique, et tous deux affichent une complémentarité remarquable. Son attachement au terroir se reflète dans les innombrables initiatives qu’elle porte au quotidien, contribuant ainsi à valoriser sa région, son village, et surtout le vignoble du Sézannais.
Un brin fonceuse, Hélène Cocteaux est une femme spontanée et pétillante, animée par un credo particulier : « ne pas perdre l’envie de travailler en dépit des embûches. J’ai toujours voulu aller de l’avant, et ce dans tous les domaines : il faut avancer, on n’a pas le droit de reculer. Le champagne est un produit de luxe ! ».
Hélène exerce son art à Montgenost, charmant bourg de 160 habitants au Sud des Coteaux du Sézannais, où elle a fait la connaissance de Benoît, qui partage aujourd’hui son quotidien à la ville comme à la vigne. Tous deux « nés dans le vin », les époux ont créé leur marque en 2005, s’inscrivant dans le sillage d’une histoire vigneronne vieille de près de quatre siècles. « C’était pour nous quelque chose d’inné », se souviennent-ils.
Les parents de la vigneronne sont originaires de Cramant et de Cuis, mais son grand-père maternel avait acheté des vignes dans le Sézannais, s’installant à Saudoy. Il en a été de même pour Benoît, dont la famille a quitté Mailly-Champagne pour fonder le domaine familial… à Montgenost.
Les deux amoureux de leur terre exploitent à ce jour quelque 10 ha de vigne répartis entre les Coteaux du Sézannais, la Côte des Blancs, la Vallée de la Marne et la Côte des Bar. Leur atout majeur : des chardonnays solaires et fruités, qui se sont distingués pendant cette campagne compliquée. C’est d’ailleurs l’une de leurs lignes de conduite fétiches : « Gérer les aléas que la nature nous impose. »
Travail d’équipe
Benoît cultive la vigne, et Hélène l’image du Champagne Benoît Cocteaux. L’un soigne ses vinifications, l’autre soigne ses contacts commerciaux. Et quand Monsieur veille sur l’évolution de ses cuvées, Madame fait de même avec sa clientèle… Une complémentarité admirable, qui se reflète jusque dans les vins qu’ils produisent. « Mon mari est sur le terrain, sur tous les fronts, en particulier dans les vignes et en vinification : nous formons une équipe, et nous essayons tous les deux de mener notre barque pour parvenir à élaborer des produits qui vont plaire, sans oublier de travailler l’aspect haut de gamme qui donnera envie d’acheter la bouteille ! », explique Hélène.
Si elle salue le travail des pionniers qui l’ont précédée – la craie de Cramant, creusée par son grand-père, accueille les visiteurs à Montgenost – la vigneronne admet que la profession est devenue plus complexe au fil des années. « Par comparaison avec la génération précédente, les attentes vis-à-vis du champagne ont changé. On vendait plus facilement à l’époque, et maintenant il est nécessaire de savoir séduire le consommateur. Et alors que le commerce devient moins facile, on a besoin de plus de professionnalisme, car la clientèle affiche des besoins de plus en plus spécifiques auxquels nous devons nous adapter. »
Une évolution de mœurs portée par la nouvelle génération, qui rompt avec la tradition des commandes de champagne renouvelées presque automatiquement : « Les jeunes n’ont pas forcément la même envie de dépenser que leurs parents et vont papillonner… C’est à nous d’appréhender le futur en trouvant de nouvelles cuvées qui vont sortir des standards. »
2022, le rebond
Après avoir « bien vécu » la dernière campagne, Hélène Cocteaux aborde l’année à venir comme « un rebond » et une suite logique de « plusieurs années d’efforts ». En pleine crise sanitaire, la vigneronne est allée « naturellement » au-devant de sa clientèle, en particulier pour essayer de compenser l’absence de salons.
Ce caractère de battante lui vient peut-être de sa grand-mère Colette, qui a poursuivi l’œuvre vitivinicole de son mari après son décès en 1986. En sa mémoire, un blanc de blancs Grand Cru a été vinifié, issu de vignes de Chouilly.
Sourire aux lèvres, Hélène Cocteaux symbolise le renouveau de la Champagne, bien qu’elle ne le revendique pas. « Le métier de vigneronne est passionnant car il n’est pas figé : j’en apprends tous les jours, et cela me rend heureuse ! »
Variations de terroir
L’an dernier, Hélène et Benoît Cocteaux ont inauguré une nouvelle gamme de champagnes intitulée « Opus Varius ». C’est leur volonté « d’obtenir une approche différente de chaque cru et chaque terre, et ce dès la prise d’échantillons dans les vignes, puis lors de la dégustation des vins » qui a donné naissance à cette démarche. Ainsi, ces cuvées parcellaires, « représentent l’identité de nos terroirs », précisent les vignerons de Montgenost. « Les Meuniers de mon Grand-Père » et « Terre Profonde » en sont les deux premiers représentants, produits respectivement à partir de la vendange 2016 et 2017 : l’un est issu des chardonnays de Villenauxe-la-Grande – et plus précisément du lieu-dit La Fayte, riche de ses sols limoneux, argileux et calcaires –, l’autre met en valeur les meuniers de Mareuil-le-Port (Le Bondy, terres majoritairement sablo-argileuses). Trois autres parcelles de l’exploitation ont fait l’objet d’une analyse signée Geoffrey Orban : Les Caurés Nord et Les Terres de Mont Aigu, à Chouilly ; Derrière l’église, à Montgenost. Ce qui promet d’offrir de nouvelles variations de terroir précises et identitaires.
Article issu de la Champagne Viticole. Retrouvez tous leurs portraits en cliquant ici.